Un pathogène tellurique en pleine expansion

La fusariose de la laitue

Un pathogène tellurique en pleine expansion
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Depuis son premier signalement en Europe en 2002 (Garibaldi et al., 2002), la fusariose de la laitue n'a pas arrêté son expansion. Cette maladie, liée à Fusarium oxysporum f.sp. lactucae, est aujourd'hui présente dans tous les pays de l'Europe de l'Ouest. Elle a la capacité de détruire totalement une culture. Comme les nombreuses autres fusarioses, la protection contre ce bioagresseur est délicate et nécessite de mettre en oeuvre des leviers complémentaires. Pour y arriver, il est nécessaire de mieux connaître certains éléments de sa biologie. C'est l'objet du projet CasDAR Actifol-Amélioration des connaissances sur la transmission, l'épidémiologie et la gestion de Fusarium oxysporum f.sp. lactucae. Ces dernières années, la filière « laitues » s'est diversifiée pour mieux répondre aux demandes du marché, avec, en particulier, l'essor de la quatrième gamme qui est en tête de la production de salades en Europe et représente 85 % des volumes de l'ensemble laitues - ­chicorées et scaroles (Vernin et Serrurier, 2020). Tous les types de laitues sont sensibles à la fusariose. Pour la France, les premiers foyers ont été découverts en 2012 dans le Sud-Est (Gilardi et al., 2017 ; Garnodier et al., 2019). Tous les créneaux de production peuvent être atteints.

Publié le 01/07/2022

Temps de lecture estimé : 15 minutes

Fusarium oxysporum, un champignon à face multiple

L'espèce F. oxysporum est complexe. Elle comprend des formes pathogènes et non pathogènes. Sous la forme pathogène du sol, elle est omniprésente et capable d'infecter plus de 150 espèces végétales ce qui n'empêche pas les différentes souches d'être hautement spécifiques à leur hôte, et génétiquement et morphologiquement distinctes (Edel-Hermann et Lecomte, 2019). Une forme spéciale (f.sp.) est composée d'isolats capables d'infecter un hôte unique ou un ensemble limité d'hôtes. Certaines souches d'une forme spéciale peuvent être subdivisées en races selon leur virulence, variable envers les cultivars du même hôte (Correll, 1991). Certaines formes spéciales peuvent être réglementées comme le F.o. f.sp. albedinis. En raison de son impact dévastateur sur le rendement des cultures, le F. oxysporum a été placé en cinquième position parmi les dix principaux champignons phytopathogènes économiquement importants (Dean et al., 2012). En fonction des formes spéciales, F. oxysporum est capable d'induire des maladies vasculaires, mais aussi des nécroses aux racines, collets ou tiges (Photo 1). Dans le cas des laitues, c'est une forme vasculaire qui induit des retards de croissance, des jaunissements et, dans les cas les plus graves, la mort des plantes. Les F. oxysporum sont des pathogènes de conditions plutôt chaudes, avec un optimum de croissance compris entre 25 et 28 °C ; leur croissance décroît pour des températures supérieures à 32 °C et inférieures à 17 °C. Leur développement dépend de leurs hôtes pour les nutriments. En présence d'un hôte, le cycle d'infection peut commencer : les spores fongiques (microconidies, macroconidies ou chlamydospores) germent et s'allongent vers les racines de la plante hôte en réponse à des signaux spécifiques de la plante. La pénétration dans les racines se produit sans la formation de structures spécialisées, par les ouvertures naturelles aux jonctions intercellulaires ou par des blessures. Une fois à l'intérieur de la racine, les hyphes envahissent le cortex racinaire, pénètrent dans l'endoderme et atteignent les vaisseaux du xylème (Photo 2). Ensuite, le champignon progresse verticalement dans le xylème. À la mort de la plante, le champignon commence une sporulation abondante à la surface de la plante, dispersant des micro- et macroconidies sur le sol pour le prochain cycle d'infection. Les chlamydospores représentent une possibilité de conservation longue durée dans les sols.


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